L’humanité en question : bilan annuel de HRW 2023

Lilli Berton Fouchet, correspondante au journal

« Ne pas faillir sur la défense des droits humains est le seul moyen pour construire le monde dans lequel nous voulons vivre. » Rapport 2023 de Human Right Watch

Le rapport annuel 2023 de Human Right Watch (HRW) offre une réflexion sur les nombreux défis en regard des droits humains dans le monde. Le bilan que présente HRW de l’année 2023 lance un appel urgent à l’action en raison des crises humanitaires auxquelles nous assistons.  

Mise en péril des droits et de la vie des civils

La répression des droits humains et les atrocités de la guerre ne datent pas d’hier. Au cours de l’année, nous avons été témoins de nettoyage ethnique dans la région du Haut-Karabakh où le peuple arménien s’est vu délogé des terres de l’Azerbaïdjan. Sans compter les autres événements notables de l’année : conflit en Ukraine, conflit israélo-palestinien, crises au Soudan, au Myanmar, en Éthiopie ou encore dans la région du Sahel. La liste est longue…

Les crises liées au climat ont aussi causé des dégâts irréversibles sur les populations et les environnements naturels, provoquant des phénomènes météorologiques extrêmes. Nous avons été face à l’année la plus chaude jamais enregistrée, qui a engendré une multitude de dérèglements climatiques. Le Canada a connu beaucoup d’incendies ; plusieurs régions du continent africain ont été les cibles de sécheresses intenses, comme au Kenya, en Somalie ou en Éthiopie ; au Bangladesh, il y a eu de nombreuses tempêtes, il y a eu des inondations meurtrières en Libye, et des températures records qui ont atteint le Brésil.

Indignation sélective et diplomatie transactionnelle

Souvent, c’est le poids des gouvernements dans les prises de décision, ainsi qu’une constante lutte de pouvoir entre les partis qui sont à la source des problèmes. Ils créent et creusent les inégalités sociales. La société civile n’a pas toujours ni les moyens ni la possibilité de remédier à plus grande échelle à ces oppressions de manière significative. Ainsi, certaines minorités visibles, telles que les membres de la communauté LGBTQIA+ et les femmes, connaissent encore des persécutions basées sur le genre.

Néanmoins, l’action seule des gouvernements, au niveau national, n’est souvent pas suffisante pour permettre de répondre aux crises des droits humains. Certains gouvernements sont restés inactifs et muets face à certains crimes, tels que le génocide qui impacte la communauté congolaise, la crise humanitaire au Yémen, etc. Les jugements sont déséquilibrés et ne sont pas fondés sur un système de valeurs d’équité, d’égalité, de bienveillance au bien-être de son prochain. Les mesures prises par les gouvernements sont fréquemment contraignantes, négligentes et inadéquates en termes de droits, de libertés et au détriment de la santé ou de moyens de résistances/subsistance des populations.

«Human Right» – Crédit Riacale CC BY-NC-ND 2.0

Situation d’impunité

On peut parfois constater un mépris de la part des états pour leur population. Toutefois, il y a des gouvernements qui sont impuissants ou qui ignorent les crises internes en raison de l’absence d’intervention et de soutien international.

Par ailleurs, on remarque des restrictions à la liberté d’expression et une montée des dirigeants autocratiques, qui eux aussi sacrifient les droits humains afin de consolider leur pouvoir.

 

 

Incohérences du système juridique international

Le rapport HRW constate d’une part qu’il existe des inégalités dans les jugements moraux des gouvernements qui sanctionnent certains crimes comme dans le conflit israélo-palestinien. D’autre part, on constate qu’ils s’abstiennent d’agir concernant les actions du régime russe ou chinois sur leur population. Ainsi, les droits humains sont compromis pour des intérêts politiques.

Au Soudan, par exemple, il y a eu des répercussions cruciales sur les civils à la suite du conflit interne entre deux groupes opposés et par manque d’engagement et de leadership de la communauté internationale pour mettre fin aux abus. Ou encore, le cas de l’Union européenne qui contourne ses obligations en matière de droits humains notamment à l’égard des personnes en demande d’asile et des migrant.es, pour favoriser des accords avec des gouvernements abusifs, pour privilégier des États membres sans égard à l’urgence ou pour prioriser une alliance militaire, etc.

« Pas de place pour double standard dans la justice »

Il est essentiel de continuer à dénoncer en espérant qu’une prise de conscience amène un changement concret dans les constitutions et repousse la violence qui ne cesse de teinter le monde.

Nous devons réfléchir à une issue universelle qui condamne les atrocités et applique de manière cohérente de la justice, parce que chaque crime, chaque guerre, chaque vie humaine perdue devrait susciter la même indignation. En effet le poids international peut influencer la conduite oppressive et impacter le sort des personnes dont les droits sont violés.

Ne voyons pas que l’aspect négatif des choses ! Dans plusieurs domaines, il y a des progrès positifs en matière de protection des droits humains. Le rapport HRW indique que 83 pays ont adopté une déclaration politique dans laquelle ils s’engagent à mieux protéger les civils contre l’usage d’armes explosives dans les zones peuplées pendant les conflits armés. Des politiques sont aussi adoptées afin de prévenir et réparer les dommages infligés aux civils. Et on constate des avancées dans la prise en compte et la reconnaissance des droits des communautés marginalisées, comme l’accès à l’avortement au Mexique.

Pour en savoir plus : https://www.hrw.org/fr/world-report/2023