Lors de la réunion du G5 Sahel le 16 février, Macron a déclaré vouloir décapiter les groupes djihadistes et confirmer la présence militaire de la France dans cette région. Pourtant de nombreuses voix en France comme au Sahel mettent en cause son efficacité.
Les buts affichés lors de l’intervention Serval au Mali puis Barkhane au Sahel sont loin d’être atteints. Il s’agissait de bloquer l’avancée des djihadistes, sécuriser le pays et éradiquer le terrorisme. Résultat, les djihadistes n’ont pas été défaits et se sont unifiés dans le « Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans ». Seul l’État islamique dans le Grand Sahara est resté indépendant. Les combattants islamistes se sont répandus sur l’ensemble de la bande sahélo-saharienne. Un nouveau foyer s’est même développé au centre du Mali. Enfin les attaques terroristes sont en forte augmentation, la dernière en date, au Niger, a fait une centaine de morts.
Crise politique
Au Mali, la crise sociale et politique perdure. Apparue au grand jour lors du coup d’État contre Amadou Toumani Touré en 2012, elle s’est prolongée par un nouveau coup d’État qui a déposé Ibrahim Boubacar Keïta à l’été 2020. En arrière-plan se développent des mobilisations massives contre le pouvoir incapable de répondre aux attentes des populations. L’inefficience de l’État, la corruption des élites et la raréfaction des ressources aiguisent les tensions entre communautés.
La force des djihadistes est d’être capables d’exploiter ces conflits en les exacerbant. Par exemple, les groupes islamistes vont s’ériger en protecteur des peuls contre les razzias de troupeaux. En parallèle, ils proposent des activités rémunératrices aux jeunes dans les différents trafics ou en les intégrant dans les katibas, leurs unités combattantes. Ainsi ils se construisent une base sociale.
Fausse réponse
L’intervention française contribue à aggraver la situation en apportant une réponse militaire à une crise qui est avant tout politique. En soutenant les forces maliennes mais aussi des milices communautaires responsables d’exactions, les troupes françaises ne font qu’accentuer la spirale de violences inter-ethniques.
Les civils paient le prix fort de cette politique quand ils ne sont pas les victimes de dommages collatéraux. C’est le cas du village de Bounti où des villageoisES ont subi un bombardement aérien opéré probablement par deux mirages français.
Le coût humain et financier de l’intervention française commence à fissurer l’union nationale qui s’était créée au début de l’intervention. Comme à chaque fois, il est toujours plus facile d’entrer en guerre que d’en sortir.
Le gouvernement français s’est enfermé dans une logique militariste. Cette logique s’appuie sur le refus de discuter avec les djihadistes. Ce qui dans les faits, ferme la porte à toutes les discussions, y compris locales. Pourtant c’est le moyen de promouvoir des solutions de coexistence acceptables par tous et qui seraient garanties par la collectivité. En effet, le premier objectif majeur est bien de casser ces spirales de violence qui se développent un peu partout dans le pays. Le bellicisme de Macron soutenu par les lobbys de l’industrie de l’armement prend le chemin inverse.
Paula Requeijo & Yanna G. Franco *
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