La semaine en Haïti (17-24 mai) : les affrontements continuent

Herold Constant, 24 mai 2021

 

Triste commémoration du 218ième anniversaire de la création du drapeau haïtien

Depuis 218 ans, le18 mai, marque la date de commémoration de l’anniversaire de la création du drapeau haïtien. Mais, depuis la prise du pouvoir par les « bandits légaux » du Parti Haïtien Tèt Kale (PHTK) en 2011, cette date devient une journée de résistance populaire. Ainsi, le 18 mai dernier, des groupes de l’opposition et de la société civile ont organisé des manifestations dans les rues de Port-au-Prince en vue de protester contre l’insécurité et la tenue du référendum illégal prévu pour le 27 juin prochain. Comme d’habitude, ces mouvements de protestation ont été prématurément dispersés par la police à coup de gaz lacrymogène sur la route de Delmas. Ce 18 mai, Arcahaie, la ville hôte traditionnelle fête du drapeau, a connu une grosse tension qui a occasionné l’incendie de deux bus de transport. À noter que la veille (17 mai), une fusillade a fait deux morts dans cette ville.

Il faut rappeler que le président de facto ne s’est pas rendu à l’Arcahaie comme le veut la tradition, lui qui aime tant ses bains de foule. Il a appelé à suivre l’exemple des ancêtres pour dénouer la crise qui ronge le pays, alors qu’il est l’un principal élément de cette crise. En cette occasion, le journal Le Nouvelliste paru (21 mai 2021) pose une question pertinente en se demandant « avec quelle opposition discute Jovenel Moise sur la crise? ». Cette question tient sa pertinence du fait que les partis et regroupements politiques les plus représentatifs de l’opposition n’entendent pas discuter avec Jovenel Moise. Car disent-ils son mandat a pris fin depuis le 7 février 2021.

Insécurité et affrontements de bandes armées à Port-au-Prince

Depuis deux semaines des gangs alliés du G9 affrontent un autre gang de Cité Soleil pour contrôler un territoire jugé stratégique dans les mouvements de protestation. Le 20 mai 2021, un minibus rempli de passagers a été aussi enlevés aux environs du stade Sylvio Cator Ce même jour, des « cambistes » (personnes jouant le rôle d’agent de change dans les rues) ont été dépouillés par des hommes armés à Delmas 33, lieu de leur activités économiques. Le lendemain, un ingénieur et entrepreneur du nom de Dave Augustin a été kidnappé le 21 mai 2021 à Tabarre contre rançon. En fin de semaine, l’enlèvement d’une jeune étudiante de l’Institut supérieur à Port-au-Prince a secoué les réseaux sociaux. Il faut aussi noter l’assassinat de 3 personnes dans la zone de Canaan dans la commune de Croix-des-Bouquets. Selon des informations données par le journal en ligne Vant Bèf Info, ce triple assassinat entre dans le cadre d’un affrontement entre les gangs de Canaan 50 et 70.

En réaction à cette dernière vague d’enlèvement, au lieu de traquer les bandits, la police a publié une note pour qui nie la trêve annoncée par les gangs armés. À noter que des rumeurs persistantes, cette trêve serait le résultat d’un accord entre l’État et ces gangs afin de créer un climat favorisant l’organisation du référendum.

Selon le Réseau National de Défense des Droits Humains (RNDDH), d’août 2020 à mai 2021, 125 personnes ont été tuées seulement au Bélair et à Cité Soleil. L’État n’a jamais levé le petit doigt. L’organisme signale que certaines fois, des équipements de la Police Nationale d’Haïti sont utilisés dans ces massacres.

Référendum illégal et résistances populaires

L’administration de facto Moise-Joseph continue, malgré vents et marrées, les préparatifs pour leur référendum illégal (27 juin 2021). Ainsi, le Secteur Démocratique et populaire projette de réaliser une tournée du 23 au 30 mai 2021 pour sensibiliser la population contre ce projet en vue d’un grand rassemblement le samedi 12 juin 2021 dans à Arcahaie.

De son côté, le parlement européen, jusqu’à date allié de Jovenel Moise, manifeste ses inquiétudes sur la question du référendum et brandit l’article 284-3 de la Constitution 1987 qui interdit le recours à la voix référendaire pour amender la constitution. À noter aussi que les débats organisés dans divers départements du pays par le Conseil Électoral Provisoire illégal sont constamment perturbés par la population qui protestent contre ce « référendum ». Ceci n’empêche pas le gouvernement à mener campagne de propagande, surtout à travers les deux principales compagnies de téléphonie mobile qui commence à submerger les utilisateurs de messages les incitant à aller voter positivement.

Remontée de la Covid-19, état d’urgence sanitaire

Selon des informations rapportées par la presse, plusieurs personnalités publiques sont décédées des suites du Covid19, dont le directeur d’une école très connue de la capitale et le directeur de l’Office National d’Assurance (ONA). D’autres sont déclarés positifs à la Covid19, dont l’ancien député d’Aquin Jean Robert Bossé.

À travers un tweet, le président de facto redéclare l’état d’urgence sanitaire pour une période de 8 jours sur le territoire national des suites d’une remontée des cas de Covid-19. Le ministère de la Santé Publique et de la Population dit recenser 457 nouveaux cas durant les 15 premiers jours du mois de mai 2021. Ce ministère exhorte la population à observer les mesures barrières. Ainsi, malgré des voix qui se sont préalablement élevées contre cette initiative, le gouvernement de facto accepte un don du vaccin Astra Zeneca dans le cadre du programme Covax des Nations Unies. 130.000 doses de ce vaccin devraient être disponibles d’ici un mois.