Projections climatiques pour l’an 2500: la Terre sera inhospitalière pour les humains

L’image du haut montre un village autochtone traditionnel précolonial (1500 EC) avec un accès à la rivière et des cultures plantées dans la forêt tropicale. L’image du milieu représente un paysage actuel. L’image du bas illustre l’année 2500 et montre un paysage aride et un faible niveau d’eau résultant du déclin de la végétation, avec des infrastructures rares ou dégradées et une activité humaine minimale. (Lyon et coll., 2021), CC BY-ND

The conversation 18 octobre

par une équipe multidisciplinaire internationale de recherche impliquant l’Université McGill et l’Université de Montréal

De nombreux rapports basés sur des recherches scientifiques évoquent les effets à long terme des changements climatiques, tels que l’augmentation des niveaux de gaz à effet de serre, des températures et des mers, d’ici 2100. L’Accord de Paris exige que nous limitions le réchauffement à moins de 2 degrés Celsius d’ici la fin du siècle par rapport au niveau préindustriel.

Depuis 1990, nous examinons les progrès accomplis au cours de cycles de quelques années grâce aux rapports d’évaluation et aux rapports spéciaux du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Les rapports du GIEC analysent les recherches existantes pour nous montrer où nous en sommes, ce que nous devons faire d’ici 2100 pour atteindre nos objectifs et ce qui pourrait arriver si nous ne le faisons pas.

Le rapport récent des Nations unies sur les contributions déterminées au niveau national (CDN) nous prévient que les promesses actuelles des gouvernements nous exposent à un réchauffement très dangereux de 2,7 degrés Celsius d’ici 2100 : ce qui devrait causer des incendies, des tempêtes, des sécheresses, des inondations et des chaleurs sans précédent, ainsi qu’une profonde modification des écosystèmes terrestres et aquatiques.

Même si certaines projections climatiques vont au-delà de 2100, on ne les prend pas en compte dans les décisions relatives à l’adaptation au climat et à l’environnement. C’est surprenant, car les personnes qui naissent aujourd’hui auront moins de 80 ans en 2100. À quoi ressemblera le monde pour leurs enfants et leurs petits-enfants ?

Pour saisir, planifier et communiquer toute l’étendue spatiale et temporelle des impacts climatiques, quel que soit le scénario, même ceux qui respectent l’Accord de Paris, les chercheurs et les décideurs doivent regarder bien au-delà de l’horizon de 2100.

Après 2100

En 2100, le climat cessera-t-il de se réchauffer ? Si non, qu’est-ce que cela signifie pour les humains aujourd’hui et dans le futur ? Dans notre récent article en libre accès paru dans Global Change Biology, nous commençons à répondre à ces questions.

Nous avons réalisé des projections à partir de modèles climatiques basés sur des profils représentatifs d’évolution de concentration (RCP, pour Representative Concentration Pathways), qui sont des « projections des concentrations de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère en fonction du temps ». Nos projections ont modélisé des scénarios de faibles réductions (RCP6.0), de moyennes (RCP4.5) et de réductions élevées (RCP2.6, qui correspond à l’objectif de l’Accord de Paris « bien en dessous des 2 degrés Celsius ») jusqu’en 2500.

Nous avons également modélisé la répartition de la végétation, le stress thermique et les conditions de croissance de nos principales cultures actuelles, afin de nous faire une idée du type de défis environnementaux que les enfants d’aujourd’hui et leurs descendants pourraient devoir affronter à partir du XXIIe siècle.

Anomalies de la température moyenne mondiale de l’air (lignes pleines) et de l’élévation thermostérique du niveau de la mer (lignes pointillées) par rapport à la moyenne de 2000-19 pour les scénarios RCP6.0, RCP4.5 et RCP2.6. Les zones ombrées mettent en évidence les horizons temporels d’intérêt et leurs années de référence nominales. L’image du bas montre les anomalies spatiales par rapport à la moyenne 2000-19 pour les climats de 2100, de 2200 et de 2500 selon les trois RCP. (Lyon et coll., 2021)

Dans notre modèle, nous avons constaté que les températures moyennes mondiales continuent d’augmenter après 2100 pour les RCP4.5 et 6.0. Dans ces scénarios, la végétation et les zones les plus propices aux cultures se déplacent vers les pôles, et la superficie adaptée à certaines cultures est réduite. Des endroits riches en cultures et en écosystèmes, comme le bassin de l’Amazone, pourraient devenir arides.

En outre, nous avons évalué que le stress thermique pourrait atteindre des niveaux mortels pour les humains dans les régions tropicales qui sont actuellement très peuplées. Ces régions pourraient devenir inhabitables. Même dans le cadre de scénarios de réductions élevées, nous avons constaté que le niveau de la mer continuerait de s’élever en raison de l’expansion et du mélange des eaux dans les océans qui se réchauffent.

Bien que nos résultats soient basés sur un seul modèle climatique, ils se situent dans la fourchette des projections des autres modèles et contribuent à révéler l’ampleur potentielle des bouleversements climatiques sur des échelles de temps plus longues.

Pour bien représenter ce à quoi pourrait ressembler un monde avec faibles réductions et chaleur élevée par rapport à ce que nous avons connu jusqu’à présent, nous avons utilisé nos projections et diverses recherches pour créer une série de neuf tableaux couvrant un millier d’années (1500, 2020 et 2500 EC) dans trois grandes régions (l’Amazonie, le Midwest américain et le sous-continent indien). Les images pour l’année 2500 sont basées sur les projections RCP6.0 et comprennent des versions avancées mais reconnaissables des technologies actuelles.