Canada : nos amis américains

Duncan Cameron, Rabble, 4 juin 2010

Après une réunion de 50 minutes à Ottawa avec le premier ministre canadien, le vice-président américain Mike Pence a annoncé qu’il était «honoré d’être ici aujourd’hui au nom d’un de vos amis et grand ami du peuple canadien, le président Donald Trump. « 

Il est peu probable que de nombreux Canadiens aient été séduits par une profession d’amitié de la part du vice-président américain au nom du président Trump.

Justin Trudeau a cependant confié la négociation du bien-être de deux Canadiens arrêtés en Chine à l’administration Trump.

Pence a promis que dans leurs négociations commerciales avec la Chine, les États-Unis travailleraient pour obtenir la libération des Canadiens détenus par Pékin.

Ce que le vice-président américain ne peut pas faire, c’est réparer les dommages causés aux relations du Canada avec la Chine avant que l’ancien diplomate Michael Kovrig et l’entrepreneur Michael Spavor ne soient détenus et emprisonnés en tant que menaces imaginaires à la sécurité nationale chinoise.

Cette action a été entreprise en représailles au Canada agissant à la suite d’une demande d’extradition des États-Unis et en arrêtant le cadre supérieur de Huawei, Meng Wanzhou, à la mi-décembre dernier à l’aéroport de Vancouver.

Interrogé sur l’acceptation par les États-Unis de lier les négociations commerciales chinoises et la libération des deux Canadiens, le responsable du ministère chinois des Affaires étrangères, Geng Shuang, a déclaré à Reuters : « Nous espérons que la partie canadienne comprendra toutes les conséquences de la politique actuelle du Canada calquée sur celle des États-Unis ».

Depuis, les ventes commerciales canadiennes en Chine ont chuté. Les exportations agricoles vers la Chine, promues par le gouvernement Diefenbaker à la fin des années 50 – une décennie avant que le Canada et la Chine établissent des relations diplomatiques – ont été réduites. Le canola, les pois, le soja et le porc canadiens sont boycottés par la Chine.

Le gigantesque investissement canadien dans la production de GNL destiné à la Chine est devenu problématique.

L’administration Trump a lancé une offensive totale contre Huawei, le géant chinois des télécommunications.

Huawei est largement considéré comme le fournisseur le plus avancé et le plus efficace du prochain matériel Internet 5G: c’est également le principal rival des entreprises de télécommunications américaines.

Les entreprises américaines qui font affaire avec Huawei doivent désormais demander l’autorisation du gouvernement américain avant de lui fournir du matériel. Cette mesure a bloqué les chaînes d’approvisionnement sur lesquelles Huawei s’appuie pour fabriquer ses téléphones et ses systèmes de commutation.

Alors que l’ère des télécommunications 5G arrive, les États-Unis veulent que leurs alliés et partenaires commerciaux boycottent les équipements Huawei au motif qu’ils agissent en tant qu’agent du gouvernement chinois et pourraient donner à la Chine l’accès à des données et informations sensibles.

La récente offensive intervient alors que l’administration Trump a organisé une guerre commerciale majeure avec la Chine. Lorsque les négociations commerciales se sont effondrées le mois dernier, Trump a fait passer les tarifs protectionnistes sur 200 milliards de dollars d’importations chinoises de 10% à 15%.

Les dommages collatéraux causés par l’escalade des désaccords avec la Chine expliquent la chute des marchés boursiers américains et la montée des tensions avec les principaux partenaires commerciaux américains, notamment en Europe, soucieux de maintenir de bonnes relations commerciales avec les États-Unis et la Chine.

Les États-Unis veulent bloquer l’ascension de la Chine. Cette politique est antérieure à Trump. Sous Obama, l’administration américaine s’est efforcée de réduire l’accès de la Chine aux marchés internationaux.

L’initiative chinoise Made In China 2025 vise à remplacer la dépendance à la technologie étrangère par des produits chinois basés sur la recherche et le développement nationaux.

Le Canada quant à lui, complice de l’attaque américaine contre Huawei, et appelant maintenant les États-Unis à amener la Chine à mettre fin à ses tirs croisés, ressemble moins à un État indépendant qu’à un territoire dépendant des États-Unis.